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Cioran : « la revanche de Simone »

Un trésor appartient à son inventeur, celui qui le découvre, fut-ce un trésor littéraire et philosophique sous la forme de 35 cahiers manuscrits Gibert jeune et Oxford à spirale, abandonné et ignoré de tous dans la cave d’un deux pièces du 21 rue de l’Odéon (Paris VIème) où une brocanteuse chargée de débarrasser les lieux a reçu mandat de nettoyer la place, tandis que là-haut à l’étage, un notaire et un conservateur de bibliothèque font dresser une liste de biens mobiliers du défunt mentionnant sous la rubrique « prisée » : « Dans la cave un lot de débarras de méritant pas description. Il n’a pas été découvert de livres ouvrages manuscrits de Monsieur Emil Cioran… ». S’il était encore de ce monde, nul doute que cette incroyable affaire lui eut inspiré quelques réflexions bien dans sa manière. On ne se hasardera pas à le faire à sa place.  Puces de Vanves Paris Flea Market Simone Baulez
Justice est donc faite : vendredi soir, la Cour d’appel a rendu un arrêt confirmant un jugement par lequel Simone Baulez, la brocanteuse qui avait sauvé de la destruction des manuscrits inédits du moraliste roumain, en est bien propriétaire. 

 

C’est la fin d’une procédure de cinq années car le juge étant souverain sur le fond, on voit difficilement sur quel vice de forme l’affaire pourrait se poursuivre, si tant est que les avocats aient le goût de se pourvoir en cassation après un arrêt aussi net. Me Roland Rappaport a commenté à l’issue de la décision : « La chancellerie des universités avait adopté une position de caste. Elle a toujours refusé d’ouvrir les discussions, se barricadant derrière son orgueil et sa suffisance. Elle a toujours refusé d’admettre que sans ma cliente, ces précieux documents auraient été perdus ». Ils l’appelaient aussi « la chiffonnière » ou « la puceuse », mépris mêlé de condescendance dont Simone Baulez s’offusquait moins que de l’injustice par laquelle on voulait la priver du fruit de sa découverte.

Source LA RÉPUBLIQUE DES LIVRES Le blog de Pierre Assouline

Pour la genèse de l’affaire nos billets :
L’Émil(e) et les deux Simone
8 février 2006 – 14 décembre 2006 – 5 décembre 2008
 

 

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